ILS DÉCROCHENT LES DIPLÔMES, MAIS PAS LES EMPLOIS
Ils décrochent les diplômes, mais pas les emplois
Les jumeaux Mathieu et Martin Dubois sont des nerds avec des parcours académiques à tout casser, mais ils sont aussi autistes Asperger et peinent à trouver un emploi à leur mesure.
«Le psychiatre qui m’a diagnostiqué m’a dit que j’avais une facilité d’apprentissage et une mémoire que lui-même aimerait avoir. Qu’il me manquait juste le social. C’est facile à dire, mais ce n’est pas facile à faire!» dit Mathieu Dubois, avec un petit rictus.
L’homme de 39 ans dit avoir «appris» à parler il y a deux ans. Avant, il n’ouvrait presque jamais la bouche en public. Juste quand il le fallait absolument, mais toujours avec difficulté. Sans compter que son ton de voix est extrêmement bas et monotone, un symptôme lié à son autisme.
«Je n’ai jamais compris c’était quoi le but de parler. Mon père nous invitait à souper Martin et moi, avec ses amis, puis on ne disait rien. Je pense qu’il devait trouver ça plate», évoque-t-il.
Mathieu a reçu un diagnostic d’Asperger en juin 2015. Depuis, il est suivi par une éducatrice spécialisée qui l’aide à surmonter ses problèmes de communication et à mieux comprendre les rouages des relations sociales.
Quinzaine d’entrevues
N’empêche, Mathieu Dubois n’a pas d’emploi depuis près de deux ans et cumule les entretiens pour différents postes. Hydro-Québec, banques, universités. «J’ai dû passer une quinzaine d’entrevues cette année, mais on ne me rappelle pas», relate-t-il.
Détenteur d’une maîtrise en sciences appliquées de Polytechnique et actuellement en train de terminer une seconde maîtrise en administration des affaires, il admet être de plus en plus découragé.
«Le problème, c’est vraiment à l’entrevue. Après, j’ai juste besoin de plus de temps pour m’adapter au milieu de travail. Je n’ai pas de besoins particuliers», assure-t-il.
Son frère Martin maîtrise pour sa part des domaines obscurs de la programmation. Docteur en informatique depuis 2015, il est actuellement en attente de diagnostic. Mais tout porte à croire qu’il serait lui aussi Asperger.
Un peu plus chanceux que Mathieu, il travaille actuellement comme développeur logiciel senior pour une boîte de jeux vidéo.
«Mais j’ai eu du pushing. J’ai eu l’emploi, parce qu’on a parlé de moi», admet-il. C’est le seul boulot qu’il a réellement occupé au cours de sa vie professionnelle. Et l’endroit lui convient, pour l’instant.
«Je ne parle pas, je fais mon travail. Je ne dérange personne», dit-il.
Selon lui, son salaire plutôt bas ne rend pas justice à ses qualifications.
- 10 % : Pourcentage d’autistes qui ont un emploi au Québec, selon les estimations de certains chercheurs. Dans cette proportion, les personnes autistes sans déficience intellectuelle ont trois fois moins la possibilité d’avoir une activité quotidienne que ceux ayant un retard intellectuel.
- 34 % : Taux d’emploi des adultes autistes dans les pays occidentaux, comparé à 54 % pour les adultes handicapés.
- 83 % : Taux d’emploi des adultes sans handicap dans les pays occidentaux.
- 50 % à 75 % : Taux de chômage des personnes autistes dans les pays occidentaux.
Source : Fédération québécoise de l’autisme, Employment and adults with autism spectrum disorders: Challenges and strategies for success, Dawn R. Hendrick (2010)
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