D'Asperrance vers Asperance...

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ETUDIANTS ASPI


UNIVERSITÉ de toulouse annonce son projet vers une université Aspie Friendly

"L'UNIVERSITÉ ASPIE FRIENDLY" : PROJET LAURÉAT COORDONNÉ PAR L'UFTMP

 
 

« Construire une Université Aspie-Friendly », projet coordonné par l'Université Fédérale Toulouse Midi-Pyrénées et rassemblant 25 établissements et partenaires en France, a pour ambition de mettre en place une expérience d’amélioration de l'intégration universitaire pour les personnes avec troubles du spectre de l'autisme sans déficience intellectuelle.

Ce projet fait partie des 17 lauréats de l'appel à projets (AAP) "Nouveaux cursus à l'université" du Programme d'investissement d'avenir (PIA) 3, avec à la clé, une dotation d'un montant de 5 M€.

Les troubles du spectre de l'autisme font l’objet d’une priorité politique, à travers les « Plans Autisme », dont le 4ème est en cours de lancement.  

Si l’imaginaire collectif associe souvent l’autisme à l’absence de parole et à des déficiences intellectuelles, il faut rappeler que de nombreuses personnes avec autisme n’ont aucune déficience intellectuelle, et même parfois des capacités remarquables.  Pourtant, dans l'enseignement supérieur, on constate que ces personnes sont peu présentes.

Or, les « Aspies », et plus généralement les étudiant·e·s à besoins éducatifs particuliers, représentent une richesse intellectuelle et des opportunités d’innovation incontestables.

De l’accès aux formations à l’insertion professionnelle

Véritable "orchestration de l'accessibilité", le projet Aspie-Friendly place l'intégration universitaire et professionnelle au cœur de son dispositif et propose des actions concrètes :

 

  • création d’un centre national de ressources et d’accompagnement dédié à l'autisme ;

  • innovation pédagogique et numérique pour des parcours adaptés ;

  • formation et sensibilisation des enseignant·e·s, personnels, étudiant·e·s ;

  • préparation à l’entrée dans l’enseignement supérieur ;

  • montage de partenariats avec des entreprises pour construire un parcours progressif d’insertion professionnelle ;

  • Job coaching ;

  • participation d’équipes de recherche spécialistes de l’autisme.

Ces actions seront évaluées afin de permettre, en cas de succès, un essaimage vers d’autres établissements et vers d’autres formes de handicap.

Un réseau de partenaires

Porté par le Professeur Bertrand Monthubert dans le cadre de l’Université Fédérale Toulouse Midi-Pyrénées, ce projet regroupe 15 établissements d’enseignement supérieur et de recherche au niveau national, mais aussi des entreprises importantes. Chacun des partenaires apporte des compétences importantes, que ce soit en ce qui concerne l’expertise sur l’autisme, l’innovation pédagogique, les technologies numériques, l’inclusion des personnes  en situation de handicap… En créant une synergie unique entre ces forces complémentaires, le projet constitue un espoir pour tous ceux qui aujourd’hui sont concernés par l’autisme sans déficience intellectuelle.

PIA > AAP "NCU" : viser la réussite et l'insertion professionnelle des étudiant-e-s

Cet appel à projets intervient dans le cadre de la réforme du premier cycle des études supérieures et vise à améliorer la réussite et l'insertion professionnelle des étudiant-e-s. Qu'il s'agisse de démarches pédagogiques innovantes, pluridisciplinaires ou de l'organisation de nouveaux parcours, les 17 projets sélectionnés contribueront directement au déploiement de cette réforme. Dès septembre 2018, les actions proposées permettront des parcours plus flexibles et plus individualisés

 Projet ASPIE > les partenaires : Aix-Marseille Université, Université Grenoble Alpes, Université Paris Saclay, Université Fédérale Toulouse Midi-Pyrénées, CNAM, Université Clermont-Auvergne, Université de Bordeaux, Université de Cergy-Pontoise, Université de Montpellier, Université de Nîmes, Université de Picardie Jules Verne, Université de Poitiers, Université de Rouen, Université Paris-Descartes, Université Paris-Est Créteil, Unité de Recherche Clinique en Economie de la Santé d'Île de France, Microsoft France, Auticonsult, Centre Ressource Autisme, Conférence des Doyens et Directeurs des UFR Scientifiques, Fédération Régionale de Recherche en Psychiatrie(FERREPSY), Fédération des Handicaps Neurologiques, Psychiatriques et Sensoriels (FHU HoPeS), Université des Sciences en Ligne (Unisciel) et Fondation Fonda'Mental.


05/11/2017
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URGENT : Mettre en place des Pairs à l'université

L’AUTISME est un mot parapluie qui sert à regrouper des réalités parfois bien différentes. Si certains  ont des difficultés à apprendre à lire ou à écrire, d’autres, communément appelés «Asperger», peuvent se montrer particulièrement brillants dans les domaines qui les intéressent. Il n’est donc pas exclu pour eux de faire des études supérieures. 



l’université de York,  a mis en place un programme de mentorat par les pairs afin d’aider les jeunes atteints d’autisme à se sentir bien à l’université.

Chez les Asperger, les deux troubles majeurs vont être la présence de mouvements répétitifs (qui confortent la personne) et les troubles des relations sociales, auxquels s’attaque plus particulièrement le programme du Dr Bebko. 

«L’université représente un défi bien plus grand pour les jeunes Aspergers que pour les autres élèves», explique ce dernier. «Le but du programme est de faire en sorte que le taux d’abandon des études en cours de scolarité ne soit pas plus élevé chez nos jeunes atteints d’autisme que chez les autres.» 

Souvent très protégés par leurs parents durant leur enfance, les Aspergers doivent s’adapter d’un coup à leur nouvelle vie et autonomie à l’université, ce qui ne s’avère pas toujours évident.

Ces jeunes font face à de nombreux défis en permanence qui sont parfois difficiles à envisager pour les autres. Il est par exemple difficile pour eux d’intégrer les règles sociales (par exemple, attendre son tour pour parler ou ne pas se tenir trop près d’une personne qui nous parle), de comprendre la communication non verbale (expression du visage, signes des mains), le sarcasme aussi. 

Tout un panel de difficultés qui vont résulter en un comportement que l’on aura tendance à qualifier de «bizarre» et qui pousseront les autres jeunes à rejeter les Aspergers. 

Et c’est là un des drames de l’université selon le Dr Bebko: «Ces jeunes ont très envie de construire des amitiés, mais ils ne savent pas comment faire et ne comprennent pas le rejet des autres. Les Aspergers ont des difficultés à apprendre simplement en observant, or, c’est de cette façon que l’on comprend et intègre la plupart des normes sociales.»



C’est à ce moment que le programme de mentorat entre en jeu.

À l’intérieur de celui-ci, deux volets:

  1. des rendez-vous en tête à tête entre élèves Aspergers et mentors (principalement des élèves du département de psychologie de l’université de York) afin d’aborder des sujets importants de façon concrète (comportement, sécurité, relations intimes, etc.)
  2. des réunions de groupe où les participants en profitent pour échanger un café tous ensemble, faire du sport ou encore des jeux de société. 

--> Le programme permet aux jeunes d’évoluer dans un environnement où ils se sentent en confiance et où ils ne vont pas hésiter à poser des questions ou à commenter l’attitude de leurs camarades s’ils le veulent. Il permet aux pairs d’expliquer concrètement aux «mentorés» ce qui peut poser problème dans leur attitude dans une situation sociale réelle.


10/11/2014
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extrait partie 7 du rapport 2017 de Josef Schovanec

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Septième partie : l'enseignement supérieur

 

 

 Les entretiens menés dans le domaine de l'enseignement supérieur offrent un décalage saisissant entre d'une part la quasi-absence de mesures ou de prise en compte formelle de l'autisme, et d'autre part le nombre d'enseignants, chercheurs ou responsables concernés par le sujet, par exemple par la présence d'une personne autiste dans leur entourage professionnel ou personnel, renforçant ainsi la conviction que la place des personnes autistes puisse également être dans l'enseignement supérieur. Plusieurs représentants de l'enseignement supérieur interrogés dans le cadre de la présente étude ont fait preuve d'une connaissance étonnamment fine de l'autisme alors même que leur domaine de recherche était différent et ont mentionné des grands noms du passé de leur discipline qui, à leur avis, auraient pu également être concernés. Ces observations peuvent s'inscrire dans le sens d'une vision ayant traditionnellement fait de l'université, avec à peine une exagération, une sorte de refuge pour certaines personnes qui de nos jours n'auraient vraisemblablement aucun mal pour obtenir leur diagnostic. 

En outre, un certain nombre de signes encourageants, déjà existants, peuvent être soulignés. Par exemple, le fait que le dernier Livre blanc de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche, remis le 31 janvier 2017, place le handicap au cœur de l'université, tant du côté des étudiants que de celui des professionnels. Ou encore peuvent être citées ici les initiatives menées ici et là pour comprendre les parcours des adultes y compris dans l'enseignement supérieur, telles que les travaux de Fabienne Cazalis. 

Ce potentiel de progrès et ces signes porteurs d'espoir, toutefois, ne sont pas spontanément convertis en inclusion dans la pratique universitaire. Toute tentative de dresser, à ce jour, la longue liste des entraves ne peut que se heurter au reproche de la non-exhaustivité ; ce d'autant plus que, contrairement à d'autres domaines peut-être, l'université connaît des évolutions qui à certains égards tendent à l'éloigner de l'idéal d'ouverture envers le monde de l'autisme. 

Avant de les aborder, mentionnons toutefois le poids du legs de décennies d'exclusion. Ainsi, l'enseignement en France, universitaire comme scolaire, aime traditionnellement s'identifier à des locaux, et éviter la présence d'éléments tiers tels que les parents ou les aides privées, autant que de devoir se dérouler hors d'un cadre ou d'un schéma connu : si historiquement ces précautions avaient pour finalité la protection des entités sectaires ou cléricales, elles pèsent lourd de nos jours dans la prise en compte des handicaps. De même, l'examen, ultime survivance des rituels universitaires anciens et clef du diplôme dont on sait l'importance psychologique, ne peut être adapté dans son déroulé que d'une main tremblante et avec la plus extrême des réticences, la moindre adaptation étant aussitôt assimilée à une réduction de niveau ainsi qu'à un privilège indu. 

Enfin, si la France ne compte pas d'Ivy League, laquelle, pour mémoire, est une ligue sportive qui désigne fort symboliquement la norme intellectuelle suprême en matière d'enseignement supérieur américain (mens sana in corpore sano), l'élitisme tout comme dans cette dernière sinon plus encore est défini en France, non point par le seul savoir, mais par une subtile association, dans le cadre des Grandes Ecoles, entre performance physique, intellectuelle et sociale : de là l'étonnante corrélation inverse, à quelques heureuses exceptions près, entre le niveau d'élitisme réel ou revendiqué d'un établissement, grand lycée ou établissement supérieur, et son aptitude à l'inclusion d'étudiants porteurs de handicap.

 

7.1  Les questions du premier cycle et de la modernisation de l'université 

 

L'un des grands chantiers de ces dernières années, ainsi que, de toute évidence, le pan de l'université ayant connu les évolutions les plus rapides, est indéniablement le premier cycle. De plus en plus, il est décroché de l'idéal universitaire tel que conçu naguère, voué à des impératifs d'ouverture au monde moderne, de professionnalisation, mais également d'acquisition d'acquis propédeutiques à l'université antérieurement dévolus au lycée. Si ces évolutions en tant que telles ne relèvent pas du sujet du présent document et représentent sans doute une nécessité du point de vue de la grande majorité des étudiants, une conclusion aussi nette ne peut être dressée au sujet des étudiants autistes. Au contraire, on ne peut que craindre que, en l'absence de mesures correctives d'inclusion et en l'état actuel des choses, nombre de personnes autistes ayant pu suivre des études supérieures par le passé ne le puissent plus à l'avenir.
Ce constat perturbant peut être liée à plusieurs évolutions. D'une part, de plus en plus, la spécialisation proprement dite, celle que nombre de lycéens autistes attendent désespérément, est retardée dans le cursus, entre autres afin de s'adapter au nombre croissant d'étudiants dépourvus de perspectives d'avenir précises. De ce fait, les désillusions risquent de devenir plus nombreuses, au fur et à mesure que s'allonge le temps d'attente entre le quotidien parfois insupportable des brimades du secondaire et le temps futur, volontiers idéalisé, où le seul sujet d'attention sera le centre d'intérêt de la personne. 
Symétriquement, les activités ou enseignements nouveaux des premiers cycles ne sont pas nécessairement les plus en phase avec le profil habituel de l'autisme, en particulier dans les établissements privés ou considérés comme d'élite : aux stages à rallonge qui désormais sont entrés dans les mœurs y compris pour les personnes ne se destinant pas ou ne pouvant pas dans un avenir proche travailler en milieu concurrentiel dur, s'ajoutent toutes sortes d'apprentissages liés tantôt au savoir-être, tantôt aux « soft-skills », tels que diverses activités de socialisation ou de « networking », des enseignements d'ouverture fort éloignés de l'environnement universitaire habituel, des « ateliers de pleine conscience » où l'on s'allonge et apprend à respirer, etc. Pour ainsi dire aucune de ces activités nouvelles n'est conçue pour être compatible avec l'autisme, sur fond d'un malentendu profond : bien qu'issues majoritairement et sous des formes diverses des tendances universitaires américaines, ces activités et leur transposition à la France négligent un point fondamental : alors que dans le contexte culturel américain, l'autisme ainsi qu'une multitude d'autres facteurs sont des justifications suffisantes et non-susceptibles de contestation pour ne pas participer, la validité d'une telle objection en France demeure à démontrer.
La lutte contre le bizutage, dont par ailleurs on ne peut que louer les effets et souhaiter le renforcement, peut toutefois occulter un phénomène sournois : l'activité des associations universitaires, désormais considérées comme propres ou non-enclines au bizutage, ne peut que s'étendre, jusqu'à rendre de plus en plus compliquée la réalisation d'un cursus universitaire où l'étudiant ne soit pas tenu d'entrer à un moment ou à un autre au sein ou en contact de l'une d'elles. Là encore, la différence entre le contexte culturel américain et son homologue français tient en l'inexistence en France d'associations d'étudiants autistes et en l'absence de culture de l'autisme dans les autres associations estudiantines.  
De toute évidence, la cause de l'autisme ne permet pas, à elle seule, d'aller à contre-courant d'évolutions profondes et sans doute nécessaires. Toutefois, et sans pouvoir donner ici de solution générale à une problématique protéiforme, liée avant tout à des enjeux locaux et spécifiques à tel ou tel cursus, plusieurs lignes de conduite pourraient être esquissées :
  • premièrement, il faudrait veiller à ce que l'étudiant autiste puisse ne pas être contraint à des activités non-liées à la discipline étudiée au sens strict : de semblables dispenses existent le plus souvent pour les étudiants ayant déjà validé un premier cycle et en faisant un autre dans une matière différente, et pourraient donc être simplement étendues.
  • Deuxièmement, l'émergence à terme d'associations estudiantines plus ou moins destinées à l'autisme, si elle paraît surréaliste à ce jour, paraît être souhaitable dans un avenir à définir : leur constitution serait assurément plus simple dans certaines universités ou écoles, lesquelles pourraient jouer un rôle moteur.
  • Troisièmement, une réflexion peut être menée sur la possibilité offerte à certains étudiants d'accéder plus rapidement aux enseignements de spécialisation ou d'érudition : des établissements tels que l'EPHE ou l'EHESS, qui ne suivent pas ou plutôt jusqu'à une époque récente ne suivaient pas le modèle habituel du cursus universitaire, pourraient être spécifiquement impliqués ; à ce titre, on pourrait envisager un système de validation inversé des niveaux, le nouvel étudiant autiste validant par exemple et moyennant coaching approprié en premier lieu sa quatrième année, bien plus liée à une spécialité qui peut avoir grâce à ses yeux, avant de valider un restant de première année une fois mieux familiarisé avec l'université.  
Une mention particulière peut être faite de la question de la professionnalisation des cursus universitaires, évolution majeure de ces dernières années. La substitution à l'idéal humboldtien d'une instruction désintéressée tout au long de la vie, de la part de figures originales avides d'un savoir aussi proche de celui d'un polymathe que possible, d'études supérieures courtes, rationalisées, ciblées sur une certaine tranche de vie et ayant de façon croissante la spécialisation et l'efficacité professionnelle pour objectifs est un fait de société. En soi, elle n'est pas nécessairement problématique pour les personnes autistes, si bien sûr elle prend en compte leurs spécificités ; toutefois, il convient de veiller à ce que les personnes autistes, sans doute minoritaires, n'envisageant pas ou ne pouvant pas envisager de professionnalisation au début de l'âge adulte puissent suivre des cursus restés à l'ancienne mode, si tant est qu'il en demeure à l'avenir. 
Une piste de réflexion parallèle, encore lointaine hélas sans doute pour l'heure, pourrait être l'adaptation ponctuelle du premier cycle, non pas cette fois aux besoins précédemment évoqués d'anciens lycéens ne disposant pas nécessairement de tous les outils que l'université requiert, mais à des personnes autistes n'ayant, du fait de carences passées de l'Education Nationale, pu suivre un cursus habituel en secondaire voire en primaire. Pour l'heure, rares, voire très rares sont les personnes ayant à un moment donné de leurs jeunes années entamé un cursus hors de l'école habituelle à leur âge et qui, ultérieurement, rejoignent à nouveau ce même cursus ordinaire. La cause la plus fréquemment avancée en sont diverses carences tant pédagogiques que de savoir-être, quand ce n'est tout simplement pas un plafond de verre purement psychologique. Un premier cycle universitaire repensé pourrait être ouvert à certaines de ces personnes – une réflexion probablement à mener en lien avec la refonte du DAEU dont il sera question ci-après.

 7.2  Former les enseignants, rendre accessibles les cours

Pour ce qui est du cas de figure des étudiants ou futurs étudiants avec autisme, comme dans d'autres domaines, une formation propédeutique aux professionnels peut être la première des mesures proposées. A l'issue des entretiens menés dans le cadre de la présente étude, un certain nombre de qualificatifs de cette formation paraissent faire l'objet d'un solide consensus : elle doit être brève, s'inspirant de la formule de la formation aux premiers secours ; elle peut éviter, pour plus d'efficacité, de porter dans son intitulé des termes tels que « handicap » ou « autisme » pour ne pas « faire peur », selon l'expression regrettable quoique réaliste de l'une des personnes interviewées : des termes plus neutres tels que « diversité des talents » peuvent être explorés. Etant donné le nombre de professionnels liés à l'enseignement supérieur et de ce fait susceptibles d'être formés, on pourra instaurer un système de hiérarchisation des priorités, avec par exemple dans une première étape les personnels des missions handicap au sens large ainsi que les principaux animateurs des bureaux des étudiants, ensuite le corps enseignant dans les disciplines accueillant traditionnellement davantage de personnes autistes telles que l'informatique – sur ce dernier point, on pourra prendre appui sur les initiatives déjà en cours par exemple à l'école « 42 ».
 
 
 
Outre ces formations, une réflexion sur les outils techniques ou adaptations lors des cours devra être menée, par exemple menée par un comité représentatif où experts et universitaires auraient toute leur place, sachant que la valeur effective d'un outil dépend au moins autant de ses qualités propres que de son acceptation et de sa compréhension par le plus grand nombre. L'expérience la plus commune tient en effet en la douloureuse inaptitude en l'état actuel des choses de l'enseignement supérieur de proposer des aménagements plus pertinents que le simple tiers-temps dans le cas de handicaps non-standards ou invisibles. Pour autant, une gamme d'outils peut être dégagée de par les expériences internationales en la matière, de complexité ou de coût variables. Pourraient être ainsi mentionnés les outils permettant de suivre un cours en différé ou à distance, depuis les microphones jusqu'aux robots de télé-présence, qui ont d'ores et déjà fait l'objet d'expériences dans certaines universités françaises, en ligne avec l'engagement du Secrétaire d'Etat à l'Enseignement Supérieur, Monsieur Mandon, en faveur du numérique. Selon l'évaluation du Pr. Wismann, moins de 10% de ses collègues universitaires seulement seraient hostiles à la présence d'un tel dispositif dans leur classe.
 Un travail de persuasion et de sensibilisation accru pourra être requis pour une revendication plus ancienne mais traditionnellement mal acceptée en France, contrairement à la tradition américaine par exemple : la possibilité de disposer des notes écrites, ou du moins de leur trame, établies et distribuées par l'enseignant lui-même. Selon un avis d'universitaire, ce dernier point, sensible, pourrait exiger de « forcer un peu » (sic) les intéressés, tout en permettant de faire évoluer par la même occasion le contenu des cours ainsi que, dans certains cas, leur qualité. Ces outils en tant que tels n'ont pas nécessairement pour vocation d'opérer une distinction nette entre suivi des cours de manière présentielle et suivi à distance : il convient plutôt de raisonner en termes de dégradé des possibles, voire de cumul : un étudiant présent au cours peut avoir tout intérêt à le suivre à nouveau à un autre moment grâce à l'enregistrement réalisé, sachant que nombre d'étudiants autistes apprennent plus efficacement à des horaires spécifiques.
Un sujet traditionnellement sensible dans l'école primaire et secondaire est celui des AVS. Une formule adaptée à l'enseignement supérieur de ces mêmes professionnels pourrait être envisagée. Assurément, la situation financière de nombre d'universités demeure délicate ; toutefois, par rapport à l'enseignement primaire, l'université offre une plus grande souplesse dans la formule qui pourrait être finalement retenue : ainsi, proches et responsables associatifs peuvent être plus aisément présents dans un cadre universitaire ; d'autres étudiants, par exemple en psychologie, peuvent y trouver autant une source de revenus que de pratique ; l'étudiant lui-même peut optimiser sa situation en choisissant ses cours et son cursus. Quoi qu'il en soit, la dimension extra-pédagogique devra être fondamentale dans ces activités analogues à celles des AVS : veiller à l'inscription à la bibliothèque et à ce que l'étudiant en connaisse le fonctionnement, veiller aux repas et trajets, etc. 

7.3  Les étudiants non-autistes 

Si les diverses tensions internationales qui laissent une marque profonde sur la société française sont combattues, à juste titre quoique de manière sans doute perfectible, dans un effet de vivreensemble, que de nombreux et méritoires efforts de sensibilisation à l'autre et de découverte mutuelle par le biais de programmes scolaires ainsi que de cursus universitaires d'histoire, langues et cultures sont menés, on ne peut que regretter d'autant plus la grande timidité sinon l'absence pure et simple de similaires démarches pour ce qui est de l'exclusion liée au handicap. Les mécanismes d'exclusion pourtant, ainsi qu'une bonne partie de leurs antidotes, partagent un même socle, phénomène facilitateur que l'on peine cependant hélas à percevoir en tant que tel.
Bien que l'université n'ait pas à se substituer aux années scolaires dans les formations fondamentales, pour être « université » au sens premier, à savoir universitas magistrorum et scolarium, elle ne peut se faire en l'absence d'un travail sur le rapport à l'autre des étudiants. De même que l'attribution de la paternité de tel objet ou découverte à tel ou tel peuple, l'enseignement des langues et cultures traditionnellement fait partie du socle de coexistence et de respect mutuel entre les peuples : pourrait de ce fait être envisagé que l'université en fasse de même dans le champ du handicap : faire connaître les inventions dues à des personnes tétraplégiques, sourdes, aveugles ou autistes, que ce soit la télécommande, le téléphone ou les ordinateurs, ne paraît pas moins important que d'induire le respect de la culture chinoise, arabe ou indienne de par l'apprentissage de la paternité par exemple de la boussole, du papier et autres chiffres.
En plus de cette mission de formation théorique générale au handicap, l'université pourrait proposer un ensemble d'incitations à certains étudiants volontaires, que ce soit de par leur penchants naturels ou l'existence de liens personnels avec de type de thématiques, pour jouer un rôle privilégié dans l'inclusion d'étudiants porteurs d'autisme, homologues spécialisés des auxiliaires de vie scolaire de l'enseignement fondamental. Ce thème se décline selon des modalités diverses dans le monde par exemple anglo-saxon, scandinave et israélien, avec cependant quelques tendances que l'on pourrait résumer comme suit. Premièrement, il existe une valorisation forte de ce que la langue américaine traduite librement nommerait « activités communautaires » : sans elles, un candidat, fût-il brillant, n'aurait que de faibles chances d'accès notamment à des universités prestigieuses. L'enseignement supérieur français, en mettant davantage en lumière l'engagement communautaire (au sens américain ou québécois du terme) des étudiants ou futurs étudiants en tant que composante incontournable de leurs études et non point en tant que simple curiosité oisive de loisirs destinée à souligner le caractère aristocratique de l'intéressé durant son temps libre destiné à lui et pour lui, accomplirait une évolution allant bien au-delà de la simple question de l'inclusion des étudiants porteurs d'autisme. 
D'autre part, en tant que forme particulière d'un tel engagement, l'université pourrait mettre en œuvre des mécanismes incitatifs à ce qu'un étudiant ait un lien particulier avec l'étudiant porteur d'autisme, pour devenir de façon formelle ou informelle un référent, sur des sujets ayant trait aux savoirs enseignés ou à des aspects sociaux plus généraux, ce que dans d'autres pays on nommerait par exemple « buddy » ou « coach social ». Les récits de vie d'étudiants ou anciens étudiants porteurs d'autisme dans la plupart des cas soulignent le rôle-pivot d'une personne donnée, qui a durant parfois des années été pour ainsi dire l'interface unique ainsi que l'ultime recours de l'étudiant vis-à-vis de l'université. Une partie de ces heures pourraient par exemple être converties en divers avantages par l'étudiant-support : accès facilité à des options payantes, voire à des clubs sportifs ou autres. Des cas de figure avec des relations d'elles-mêmes équilibrées ou bilatérales peuvent être mis en lumière afin de susciter de l'émulation, y compris lorsque l'échange est en apparence purement intéressé, comme dans le cas paradigmatique où l'étudiant autiste aide ses camarades dans les devoirs de mathématiques en échange de soutien sur le plan social.   
Pour ce qui est de la vie estudiantine hors du cadre des cours au sens strict, notamment dans ses dimensions structurées par les étudiants (sorties, libres discussions, travaux collectifs, etc…) ainsi que celles où les étudiants sont fortement présents (restaurant universitaire), il conviendra de veiller à ce que des cas d'exclusion brutale, indépendamment de la volonté de l'étudiant autiste, ne soient pas considérés comme plus anodins que des comportements similaires prenant prétexte de, par exemple, l'origine ethnique. L'application de ce dernier point toutefois sera sans doute plus efficace par le biais d'incitations plutôt que de vaines menaces de sanction. D'autant plus que le simple fait de songer avant tout événement à la possible présence d'un étudiant porteur de certaines particularités représente un pas considérable dans la direction voulue. 
En somme, et bien que cette tâche soit redoutablement ardue, il convient de tendre à la réalisation d'une culture estudiantine valorisant la différence, pour ce qui est de notre sujet ici la différence sur le plan du fonctionnement autistique. 

7.4  Faire appel à l'autisme en tant qu'atout dans la compétition entre établissements 

La prise en compte du handicap en France dans l'économie, et ce depuis au moins les mutilés de la Grande Guerre, s'est faite par l'intervention de l'Etat lequel, de ses normes, a veillé à contraindre, dans une mesure et selon des priorités variables, les acteurs économiques à prendre en compte telle ou telle particularité humaine. Cette approche, assurément insatisfaisante, paraît néanmoins incontournable du moins à brève échéance. En dépit du caractère sensible du sujet ainsi que l'actualité nous le rappelle, un réexamen du poids du handicap dans les critères de l'attribution des financements aux universités paraît souhaitable, et ce sur divers critères, tels que, bien entendu, la présence des étudiants en question, mais également l'accessibilité par exemple à l'autisme des locaux, y compris de restauration, et autres événements universitaires. 
 Pour autant, non seulement ces mesures d'attrition, outre le fait de faire porter un potentiel fardeau additionnel à des structures fragilisées dont la simple perspective pourrait en soi faire hésiter tout décideur, ne couvrent qu'une faible part du champ d'action nécessaire, elles risquent d'induire la détestable impression que l'autisme ne serait qu'une contrainte ou une charge supplémentaires. L'approche symétrique, à savoir celle de l'incitation par la perspective d'opportunités nouvelles, si elle est assurément plus délicate dans sa mise en œuvre, paraît davantage porteuse d'espoirs ; deux versants peuvent en être dégagés sinon distingués, à savoir l'organisation en tant que cursus d'études à part entière d'études du handicap (disability studies) et l'investissement sur des talents atypiques. Le sujet spécifique de l'histoire embryonnaire jusqu'à une période récente de la recherche, autre que médicale ou prosthétique, en matière de handicap en France ne peut être abordé ici sinon pour rappeler que l'autisme devrait y avoir toute sa place, et que des universités du monde doivent une partie de leur heureuse fortune au succès que leur département pionnier de disability studies connut au cours des décennies écoulées.  
 L'investissement d'avenir par le biais de la quête de la présence de talents atypiques, à peu près inexistant à ce jour en France dans les établissements d'enseignement supérieur au sens habituel du terme, est bien connu dans d'autres pays, au point de devenir un quasi-phénomène de mode, une manière louable à n'en pas douter d'attirer l'attention publique sur l'établissement en question. Ainsi, en Israël, pays où cette approche fait désormais partie intégrante de la compétition que se livrent les universités du pays, on peut signaler au moins deux campus proposant des cursus spécifiquement conçus pour les étudiants porteurs d'autisme, et ce à Ariel ainsi que, depuis peu, en banlieue de TelAviv, sans évoquer des projets similaires privés (AQA) ou militaires (ro'im rahoq). Ces exemples, quoique tentants, ne relèvent pourtant probablement pas d'une perspective réaliste à moyen terme en France, étant par trop liés à un contexte local, tant en matière d'emplois issus du secteur des hautes technologies, que pour ce qui est de la connaissance générale de l'autisme par les divers acteurs de la recherche autant que de ses débouchés, sans même évoquer le fait que les établissements d'enseignement supérieur français, traditionnellement, ne relient pas leur politique d'admission des étudiants à un calcul des retombées potentielles à un horizon d'une quinzaine d'années. En outre, tout projet de transposition des centres israéliens pourrait poser des défis juridiques. 
 Pour autant, une palette de mesures allant dans le sens d'une meilleure prise en considération de l'intérêt à l'inclusion des étudiants porteurs d'autisme peut être esquissée, des plus simples en apparence jusqu'à d'autres plus ambitieuses. Ainsi, il paraît hautement souhaitable que des représentants du monde universitaire soient présents dans les cafés et autres rencontres qui rassemblent des jeunes et des adultes porteurs d'autisme, et dont le dynamisme n'est plus à démontrer dans plusieurs villes de France. De même, leur plus grande implication dans des réunions où s'écrit l'avenir de l'autisme en France, à l'instar du Comité National d'Autisme sous ses différentes formes, peut représenter bien plus qu'une formalité.  
Pour ce qui est du guide de l'étudiant autiste, inspiré, toute proportion gardée, du guide de scolarisation de l'enfant autiste dont on connaît la laborieuse genèse et la plus lente encore diffusion effective, il pourrait être intéressant d'explorer, précisément dans l'objectif d'éviter ces errances passées, la possibilité que chaque établissement d'enseignement supérieur conçoive le sien, le guide national ne fournissant qu'une trame. Rares seraient les établissements n'étant physiquement pas en mesure d'en éditer, étant donnée la quantité de documents, des tracts aux brochures les plus diverses, qu'un établissement d'enseignement supérieur moyen signe de son nom. 
Piste moins connue jusqu'ici, la possibilité d'avoir recours de manière ponctuelle, en tant qu'experts, à des anciens élèves autistes ayant par exemple fait carrière ou trouvé refuge dans des universités étrangères. Il s'avère en effet qu'un certain nombre, non-négligeable sans être particulièrement élevé, d'anciens étudiants autistes français ont trouvé leur place dans des structures de recherche non-françaises. Connaissant mieux que quiconque les défis ainsi que les moyens ayant permis de les surmonter, ils seraient autant experts que visages de la réussite pour les futures générations d'étudiants. Trouver des noms possibles ne devrait poser aucune difficulté particulière, notamment dans les disciplines scientifiques et dans certains établissements au moins (l'ENS au premier chef). 
 En France cette fois, il paraît souhaitable de constituer une base de données pouvant être relativement réduite dans un premier temps de noms de médiateurs spécifiquement destinés à la gestion d'incidents de la vie universitaire ou de divergences de vue. Opérant de manière plus ponctuelle que les assistants ou auxiliaires de l'âge enfantin, plus professionnels et labellisés que les étudiants-ressources ou coaches sociaux, ils pourraient être la réponse des autorités publiques aux coaches privés hors de prix et à la compétence discutable ainsi qu'aux situations de blocage les plus communes.  
 Dans le domaine des mesures pouvant être pleinement qualifiées de mesures d'accessibilité, si pour l'heure la création de campus universitaires tout à fait compatibles avec les profils autistiques n'est pas à notre portée, deux points cruciaux dont l'accessibilité pourrait être améliorée à moindre frais pourraient être, d'une part l'écueil des repas de midi, que toute mission handicap devrait pouvoir contribuer à surmonter par des solutions adaptées au profil de chaque étudiant, telles que des stages de familiarisation avec l'offre disponible au sein de l'université ou en dehors, la mise à disposition d'un lieu protégé, etc. D'autre part, les entretiens menés avec les personnes autistes montrent qu'un facteur étonnamment fréquent d'échec ou de difficulté tient aux contraintes propres de la bibliothèque : l'attrait que nombre de personnes autistes éprouvent pour ce lieu est singulièrement tempéré par des limitations d'heures d'ouverture qui ne correspondent pas nécessairement au rythme de vie de la personne autiste et dont l'effet premier est une sur-occupation des sièges disponibles rendant impossibles la concentration en tant que telle ou certains rituels tels que le fait de faire le tour de sa chaise pour réfléchir. Certaines consignes, perpétuées par la simple inertie de l'habitude plus qu'issues de la raison, limitent le prêt ou les façons de s'asseoir dans les locaux, pour ne citer que ces exemples qui reviennent de manière répétitive dans les témoignages. 
 Enfin, un mécanisme de valorisation des universités vertueuses peut être envisagé, non point nécessairement sous forme de labels ou trophées dont le monde du handicap regorge de toute manière, mais par exemple par leur évocation parmi les futures ressources du site officiel de l'autisme ainsi que par une gratification financière à déterminer.  

7.5  La création de nouveaux cursus 

En plus des inévitables évolutions de l'enseignement supérieur tel que nous le connaissons, de nouvelles modalités d'accès au savoir universitaire doivent être imaginées. Contrairement aux erreurs qu'une trop hâtive schématisation du passé suscite, il convient de noter que l'histoire du paysage universitaire français a connu ses évolutions les plus importantes non pas tant par la réforme de l'existant, mais plutôt par la création de structures nouvelles qui à chaque fois bousculèrent l'ancien, avant d'être pleinement acceptées voire devenir les dépositaires d'une tradition jugée authentique. Ainsi, à la Renaissance et au Siècle des Lumières, le déclin des universités issues du moyen-âge et désormais dépourvues de leur universalisme d'antan, fut compensé par la création des académies et de la Royal Society. La fondation des Grandes Ecoles pour ainsi dire canoniques après la Révolution française en réaction aux troubles que traversait l'université suivit de peu. Citons enfin le foisonnement créatif des Trente Glorieuses avec la fondation de l'EHESS, celle des universités de la banlieue parisienne faisant éclater la vénérable Université de Paris, etc.
Dans cette perspective, l'incarnation de l'enseignement supérieur dans des formes nouvelles de transmission du savoir relèverait plus de la continuité historique que du bouleversement inducteur de chaos. En matière d'ouverture à des publics traditionnellement exclus, ces cursus non-standard ont eu une première ébauche dans certains organismes privés tels que l'école « 42 », dont Xavier Niel exposait les conditions d'émergence dans un éditorial de juin 2013, avec entre autres ces mots : « On peut être en échec scolaire et pourtant correspondre à ce qui est un génie en informatique. On peut ne pas avoir le bac et pourtant devenir le développeur le plus brillant de sa génération ». Si l'autisme n'était pas explicitement le cœur de métier de cet établissement à sa fondation, il compte parmi ceux qui sont les plus intéressés par le sujet et qui sollicitent le plus les professionnels spécialisés.
Toutefois, plus que de compter sur la seule constitution spontanée, en certains lieux et domaines uniquement, d'établissements privés hors cadre habituel dont le degré de prise en compte du handicap peut être aussi fluctuant que les résultats effectifs, une réflexion sur la possibilité de leur donner un cadre, non point pour en restreindre le dynamisme ou pour en attribuer la gestion à l'Etat, pourrait permettre de viser la fondation d'un réseau d'établissements répartis sur le territoire et allant au-delà du seul domaine informatique. Cette démarche pourrait s'appuyer sur l'implication soit d'experts internationaux, soit de praticiens dont l'expérience serait mise à profit cette fois dans une optique non de conservation de l'existant, mais de transmission des savoirs : en guise d'illustration de ce dernier point, des professionnels expérimentés de la structure « le Chalet » (mieux connu sous le nom de « zoo de Lorient ») pourraient contribuer à la fondation d'un centre de formation à leurs métiers d'expertise.
Un cadre étonnamment peu mobilisé quoique fort adapté est la Grande École du Numérique. Pour mémoire, la Grande École du Numérique, lancée en septembre 2015 par le Président de la République, vise à proposer des apprentissages innovants aux métiers du numérique, en particulier pour les personnes qui n'y auraient autrement pas eu accès. Ses formations, de courte et moyenne durée, sont réparties sur tout le territoire français. De ce fait, la GEN est un cadre particulièrement indiqué pour l'inclusion des personnes autistes, même éloignées de l'emploi, à condition de tenir compte spécifiquement de cette mission. Avec l'arrivée en octobre 2016 de partenaires privés dans le programme de la GEN, le champ des possibles est encore augmenté. Deux pistes d'action peuvent être envisagées : premièrement, de créer au moins une formation labellisée spécifiquement destinée à l'autisme, sur le modèle par exemple de AQA (Israël) ; deuxièmement, de veiller à ce que les instances de pilotage de la GEN délibèrent, au moins une fois, sur la question de l'autisme. 
 Enfin, la piste de l'enseignement à distance, en plus de ses divers aspects bien connus, pourrait jouer un rôle bien plus significatif pour les étudiants autistes que ce n'est actuellement le cas. A ce titre, la présence d'un certain nombre de professeurs eux-mêmes autistes dans un organisme tel que le CNED, plutôt que d'être dissimulée, pourrait être mise à profit pour faciliter le déploiement de cette mesure. 

7.6  La constitution d'une université pilote ou modèle 

Si la situation économique, administrative et pédagogique de nombre d'universités françaises est indéniablement difficile, parfois au point de rendre incertain leur avenir budgétaire immédiat, et si ces obstacles, en dépit des indéniables bonnes volontés, peuvent rendre irréaliste une résipiscence en matière d'autisme à brève échéance, une perspective intéressante pourrait être celle de la désignation d'une université pilote ou modèle en matière de prise en compte de l'autisme. Bien qu'il n'appartienne pas à ce présent document de la désigner, les échanges avec les responsables administratifs compétents laissent relativement peu de doute quant à celle qui pourrait être la candidate idéale, autant du fait du chemin d'ores et déjà parcouru que grâce à ses prédispositions en la matière, l'objectif de long terme étant, bien entendu, qu'un mouvement d'entraînement se mette en place par rapport aux autres établissements. 
L'université pilote pourrait, afin d'être tenue pour telle, s'engager à respecter, de manière transparente et en lien permanent avec le monde associatif et les autres instances spécialisées, une charte détaillée. Cette charte à concevoir pourra prendre en considération toutes les facettes de la vie universitaire dans leurs liens avec l'autisme : présence d'une forme d'AVS, en particulier lors des premiers temps de présence à l'université, présence d'au moins une association d'étudiants autistes digne de ce nom et disposant de locaux propres en plus de la sensibilisation des autres associations, formation à l'autisme de tous les professionnels, y compris non-pédagogiques, mise en accessibilité des lieux de résidence, de repas et soin particulier accordé aux déplacements, possibilité étendue de suivi de cours à des horaires décalés, à distance ou dans un ordre non-typique (troisième année avant la première, à titre d'exemple), reconnaissance des apprentissages en autodidacte, dispense possible des enseignements dont la visée n'est pas la connaissance spécialisée, présence au moins par intermittence de figures-modèles telles que d'anciens étudiants autistes, adaptation de la bibliothèque ou du moins d'une partie d'elle avec des horaires d'ouverture atypiques, pour ne citer que les points principaux. Bien entendu, le recrutement d'enseignants porteurs des mêmes particularités pourrait faciliter la donne. 

7.7  L'emploi de personnes autistes dans l'enseignement supérieur et la recherche 

Si la question de l'autisme à l'université se pose le plus spontanément pour ce qui est des étudiants porteurs d'autisme, le cas de figure des chercheurs ou enseignants eux-mêmes concernés ne doit pas être négligé, et ce pour plusieurs raisons majeures : la plus-value en terme de recherche que peut représenter leur compétence, y compris dans des aspects directement liés à l'autisme, tels que la loyauté, l'objectivité et la passion ; une raison pour ainsi dire sociale, puisqu'il semble exister une, certes numériquement faible, portion de la population pour laquelle les métiers de la recherche, plus encore que ceux de l'enseignement supérieur en tant que tel, semblent constituer la seule piste d'inclusion. Enfin, et de manière peut-être plus troublante, on peut souligner que la sensibilisation à l'emploi scientifique des personnes autistes permettrait de mieux percevoir un certain nombre de personnes déjà dans l'emploi : en effet, un certain nombre de personnes autistes travaillent déjà dans des organismes tels que le CNRS, certaines diagnostiquées, d'autres non ; leur point commun est de devoir pour l'heure garder leur particularité secrète tout en représentant une énigme humaine pour leurs collègues. 
Inutile de revenir sur les facteurs ayant rendu de plus en plus problématique l'accès de personnes autistes aux métiers de la recherche, traditionnellement leur chasse gardée. De nos jours, le milieu de la recherche ne connaît quasiment plus de chercheurs isolés absorbés dans leurs seules préoccupations, dépourvus de toute obligation de rendre des comptes ; au contraire, la recherche est de plus en plus tendue vers un objectif concret, et met en action des équipes soudées, évaluées sur leurs résultats par des comités dont le degré de spécialisation est variable, souvent plus sensibles aux thèmes à la mode qu'à l'érudition. Les restrictions pesant sur l'emploi scientifique ont en premier écarté, schématiquement depuis les années 1980 dans les sciences humaines et plus récemment quoique de manière incomplète dans les sciences dites dures, les profils originaux au profit des candidats veillant particulièrement à soigner leur curriculum vitae universitaire et à entretenir de nombreux liens personnels ; les chances de chaque chercheur en poste d'imposer tel ou tel de ses élèves parmi les futures recrues étant fortement réduites dans le meilleur des cas, aucun risque ne peut être pris dans la proposition de profils non-standards. 
En contexte budgétaire tendu, la question de l'emploi scientifique n'admet certes pas de réponse simple ; tout pourtant n'est pas uniquement lié à ces aspects. Ainsi, les voies spécifiques d'accès à la fonction publique destinées aux personnes handicapées mises en place durant des années plus fastes n'ont, semble-t-il, jamais été véritablement mises en œuvre dans le domaine de l'enseignement et de la recherche à proprement parler, leur simple existence étant inconnue aux responsables. Toutefois, une évolution importante récemment effectuée du décret régissant le recrutement des enseignants-chercheurs permettra leur recrutement à l'essai pendant un an, des dispositions au demeurant similaires à celles du cadre juridique précité. Les chiffres avancés par le Livre blanc 2017 sont pour autant encourageants : le nombre de personnels en situation de handicap dans les universités a fortement augmenté, le taux d’emploi passant de 0,88% en 2010 à 2,76% en 2016. Certes, ces chiffres sont encore loin de l'objectif des 6% ainsi que du taux d'emploi de la fonction publique en général ; en outre, on ignore la nature des postes ainsi pourvus. 
 En amont du recrutement proprement dit, peut être évoqué le temps de la thèse de doctorat. Rares sont les personnes autistes, en particulier dans les matières littéraires où la durée de thèse tend parfois vers l'infini, qui surmontent sans tensions cette phase, une forme de profond arbitraire paraissant régir les rapports entre directeur de thèse et doctorant porteur d'autisme. Les spécificités de ce dernier le mènent souvent à ne pas relancer le directeur de thèse, et donc à demeurer dans un isolement à peu près absolu. Les situations où le mémoire de thèse, pourtant prêt, n'a pas été déposé pour des raisons purement administratives insolubles du fait de l'autisme ne sont pas rares, et ont un effet délétère sur la suite de la vie de la personne. Il serait envisageable de disposer, discipline par discipline, d'une série de directeurs de thèse sensibles ou sensibilisés à ces sujets ; inutile toutefois peut-être de constituer des répertoires nationaux officiels : la relative discrétion de cet environnement autorise la transmission informelle, dès lors qu'elle est portée par un climat favorable. Une association devrait pouvoir être identifiable comme susceptible de venir en aide aux doctorants autistes les plus en difficulté – les associations habituelles de thésards ne pouvant par exemple pas résoudre la situation du doctorant dépourvu de tout contact avec son directeur de thèse faute de pouvoir ou savoir téléphoner. 
Une appréhension souvent soulevée, tant du côté des rares responsables de l'enseignement supérieur intéressés par le sujet de l'embauche de personnes autistes qu'auprès de ces personnes elles-mêmes tient dans la capacité de « tenir » une classe ou un groupe de travaux dirigés. Cette question, bien réelle et dépendant naturellement du profil de chaque personne dont, au demeurant, on ne peut jamais tout à fait prédire les évolutions, doit être mise en perspective avec la nature effective du travail professoral : selon les cursus et selon les établissements d'enseignement supérieur, les aptitudes requises peuvent varier du tout au tout, les cursus hautement spécialisés et les années supérieures (master, doctorat) exigeant généralement moins de compétences sociales. Il est donc possible, avec une raisonnable fiabilité, de trouver un poste en phase avec le profil de la personne. Les entretiens menés avec certaines d'entre-elles mettent en lumière l'importance de disposer d'une formation pédagogique, que ceux qui ont un profil universitaire pur, c'est-à-dire qui ne sont pas passés par le métier d'enseignant du secondaire, n'ont pas nécessairement acquise durant leurs années de formation. Il s'agit là d'une réflexion qui dépasse le seul cadre de l'autisme. 
D'autres formes d'association à la recherche peuvent être explorées. Certaines sont déjà en place et ne demandent qu'à être reconnues, à l'exemple des personnes autistes qui consacrent leur vie à la recherche en vivant de minima sociaux, parfois avec un volume horaire au moins égal à celui des enseignants-chercheurs de métier, et qui sont pour nombre d'entre-elles auteures d'ouvrages tantôt inédits, tantôt publiés de manière anonyme sur Wikipédia ou internet en général (plusieurs découvertes majeures ont été publiées de la sorte ces dernières années par exemple en mathématiques), plus rarement dans des revues prestigieuses. Des projets visant à la reconnaissance de ces talents ont été esquissés dernièrement ; citons parmi ceux-ci notamment les événements liés à Wikipédia et à l'autisme : bien que cette dernière ne vise pas à présenter des travaux de recherche, nombre de ses contributeurs et, plus encore, de ses responsables bénévoles se rapprochent du profil de la personne autiste chercheuse motu proprio. Tandis que la culture anglo-saxonne de la recherche a pour tradition d'associer des personnes extérieures aux projets de recherche, une telle démarche passe pour incongrue voire inappropriée en France. Pourrait ainsi être considéré un dispositif de reconduction bienveillante des minima sociaux dans le cas où la personne bénéficiaire, y compris en l'absence d'autres activités de recherche d'emploi, publie un certain nombre de travaux de recherche ou d'utilité générale répondant à des standards établis de qualité ; dans les faits, un tel arrangement existe de facto déjà, et ce plus souvent qu'on ne le croit, de par les relations établies parfois entre telle personne autiste et tel conseiller Pôle Emploi ; toutefois, elles ne survivent que rarement à un changement d'interlocuteur ou à l'introduction de nouvelles normes. 
Quelques cas d'initiation aux métiers de l'enseignement ont pu être observés dans le cadre d'un enseignement dispensé dans des établissements parallèles, tels que le Collège International de Philosophie, l'Association Philotechnique ou certaines universités populaires. Vecteur indéniable d'acquisition de compétences, cette activité peut toutefois présenter le risque de ne jamais aboutir à un emploi économiquement viable.

21/03/2018
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